La Beta 21 (b 2.1) est une montre-bracelet électromécanique à quartz avec circuit intégré commercialisable. Elle tire son origine de la Beta 2, qui avec la Beta 1 constituent les premiers prototypes de montres à quartz avec circuit intégré. Tous deux ont été élaborés de 1962 à 1967 par le Centre Electronique Horloger (CEH) à Neuchâtel. A l’époque, le CEH consiste en une équipe de recherche, mise sur pied par la Fédération horlogère (FH) et cofinancée par des entreprises horlogères suisses concurrentes. Ces dernières avaient souscrit à l’idée d’investir dans un projet commun pour faire face aux concurrences japonaises et américaines, et mener la transition entre horlogerie mécanique et horlogerie électronique. Les avantages de la montre-bracelet électronique prévoyaient en effet d’être nombreux : davantage adaptée à la production de masse automatisée selon un rapport de la FH, elle promettait par ailleurs d’être incomparablement plus précise que la montre-bracelet mécanique. Ceci en substituant aux oscillations du balancier-spiral les vibrations beaucoup plus régulières du quartz pour réguler la montre, et, aux ressort de barillet et rouages mécaniques, une batterie et des circuits intégrés pour délivrer et transmettre l’énergie, éliminant ainsi les sources de frottement mécanique. Ceci établi, les principaux défis relevés par le CEH consisteront à miniaturiser batterie, quartz et circuit intégré dans la limite du possible pour les intégrer au volume à disposition dans une montre-bracelet.
La photographie montre le mouvement de la Beta 21. Il s’agit d’un mouvement électromécanique (pas encore entièrement électronique, donc). En bas à gauche, on aperçoit la pile électrique qui fournit l’énergie au mouvement. La fréquence du signal électrique est régulée par le quartz (encapsulé dans le module régulateur en haut à gauche) puis réduite et transmise, par l’intermédiaire d’un circuit intégré électronique et d’un moteur à vibration (partie de droite), au rouage (mécanique, de l’autre côté du mouvement) qui met en mouvement les aiguilles. De l’autre côté du mouvement, l’affichage analogique permet d’indiquer l’heure, la minute, la seconde et la date (quantième). Plus qu’un choix stylistique, le format rectangulaire du mouvement reflète la nécessité d’introduire un maximum de composants (dont des composants relativement longs et taillés sur une base rectangulaire, tels que le quartz) dans un minimum de volume à disposition. Ceci, au départ, pour ne pas dépasser les limites de taille imposées pour les montres-bracelets par le règlement du Concours chronométrique de l’Observatoire de Neuchâtel.
En 1968, les prototypes de la Beta 21 remporteront les premiers prix du Concours de l’Observatoire de Neuchâtel, loin devant la première montre-bracelet mécanique. Les places suivantes étant occupées par les prototypes à quartz soumis par l’entreprise japonaise Seiko-Suwa, les entreprises horlogères actionnaires du CEH prennent conscience de la rapidité avec laquelle le CEH devra œuvrer pour que l’industrie horlogère suisse soit la première à mettre au point une version commercialisable. Or, comme ils s’y attendaient, réaliser un calibre qui soit viable sur les marchés pose de nombreux problèmes. La durée extrêmement limitée de la batterie ainsi que la fragilité du quartz aux chocs, notamment, doivent être résolus. Au final, c’est un peu moins de 6000 pièces qui seront vendues – 700 francs l’unité – aux actionnaires du CEH, afin qu’ils puissent s’approprier la technologie et développer leurs propres designs. Les japonais de Seiko-Suwa seront les premiers à commercialiser sur les marchés un calibre de montre à quartz et Omega parmi les seuls actionnaires du CEH à commercialiser la Bêta 21. Au-delà de ces considérations, en remplaçant la montre mécanique par la montre électromécanique puis électronique, l’industrie horlogère devra faire face à de grandes mutations, du point de vue notamment du métier d’horloger, désormais appelé à maîtriser un appareillage électronique.
Berner, G.-A., « Montre à quartz » ; « Beta 21 », in : G.-A. Berner, Dictionnaire professionnel illustré de l’horlogerie I + II, Bienne : Société du journal La Suisse horlogère, 2007, entrées n° 3047 ; 422.
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