Frédéric-William Dubois, originaire du Locle, construit ce régulateur entre 1843 et 1846 au Château des Monts (demeure de son aïeul, aujourd’hui Musée d’horlogerie du Locle).
Apparus à la fin du 17e siècle, les régulateurs sont des horloges servant de référence pour contrôler l’exactitude de la marche des montres. Leur marche, la plus régulière possible, est elle-même contrôlée, à l’époque, par l’observation du mouvement des astres. Aux 18e et 19e siècles, ces régulateurs participent activement à la quête de la mesure exacte du temps (chronométrie). Cette quête sera encouragée par des concours organisés par des Observatoires et des Sociétés d’émulations. Plusieurs de ces concours auront lieu à Londres et Paris, considérées comme capitales de la chronométrie, mais aussi dans le canton de Neuchâtel – Le Locle hébergeant aux 18e et 19e siècles plusieurs chronométriers formés dans les capitales française et anglaise. L’Exposition universelle de Londres de 1851 constituera une autre occasion de mettre en compétition des chronométriers à l’échelle internationale. Frédéric-William Dubois y présentera son régulateur et obtiendra un prix en lien avec l’échappement qu’il y avait développé.
La taille de ce régulateur est celle d’une horloge de parquet. Son cadran indique les heures, minutes et secondes. Contrairement aux horloges à vocation ornementale, destinées à meubler les pièces au même titre que le reste du mobilier, son cabinet en plâne ciré est d’une grande sobriété. Que ce soit de face ou sur les côtés, il disparaît presqu’entièrement au profit du mécanisme, symbole et moteur de la précision du régulateur. A l’intérieur du régulateur, le mécanisme comporte une variante de l’échappement à détente, que les chronométriers tels que Frédéric-William Dubois affectionnaient tout particulièrement. Il s’agit d’un échappement libre « à coup perdu », appelé en son temps « échappement à cheville à repos indépendant », qui fournit au pendule une seule impulsion par oscillation. C’est par ailleurs à ce type d’échappement qu’il faut attribuer le fait que l’aiguille des secondes se déplace de deux secondes en deux secondes dans le cas de ce régulateur. Son mécanisme est également équipé d’un pendule compensateur à gril battant la seconde, composé de deux tringles de laiton et de trois tringles d’acier. Les tringles de laiton se dilatant à mesure que les tringles d’acier se contractent (et vis-versa) sous l’effet des changements de température, elles seront longtemps utilisées par les chronométriers pour assurer une longueur constante du pendule et donc une régularité de ses oscillations.
C’est notamment en participant aux Expositions universelles que les chronométriers loclois ont acquis une réputation en matière de chronométrie à même de concurrencer celles de Paris et Londres auprès de clientèles internationales. Plus qu’une preuve de savoir-faire, la mesure exacte du temps revêtait un enjeu de taille : celui de mesurer la durée exacte écoulée depuis le départ d’un navire, pour calculer, à l’aide de la vitesse du navire en question, sa position exacte en mer. Au Locle, Frédéric-William Dubois formera Ulysse Nardin, rendu célèbre par ses chronomètres de marine. Il dirigera la construction de plusieurs autres régulateurs, dont un qui garantira la distribution d’une heure exacte dans le canton depuis l’Observatoire de Neuchâtel.
Berner, Albert, Ditisheim, Paul, « Les horloges de précision » [chapitre XIII], in : Chapuis, Alfred, Histoire de la pendulerie neuchâteloise, Genève : Slatkine, 1983 [1917], pp. 357 ss.
Berner, G.-A., « régulateur », in : G.-A. Berner, Dictionnaire professionnel illustré de l’horlogerie I + II, Bienne : Société du journal La Suisse horlogère, 2007, entrée n° 3917.
Chapuis, Alfred, « Notes biographiques et index », in : Chapuis, Alfred, Histoire de la pendulerie neuchâteloise, Genève : Slatkine, 1983 [1917], p.462.
Chapuis, Alfred, Grands artisans de la chronométrie : Histoire de l’horlogerie au Locle, Neuchâtel : Editions du Griffon, 1958.
Seguier, Armand, « Xe Jury, IIe subdivision. Horlogerie » in : Exposition universelle de 1951 : Travaux de la commission française sur l’industrie des nations, Paris : Imprimerie impériale, Tome III, 2nde partie, 1855, pp. 34 ; 38 ; 52 ; 60-62.
Lettre de Frédéric-William Dubois aux membres du Jury d’admission à l’Exposition universelle de Londres, Le Locle : 8 février 1857, [Archives Chapuis, Musée d’horlogerie du Locle].