En horlogerie mécanique, le « tourbillon » (cage permettant à l’organe réglant de tourner sur lui-même) aspire à l’origine à une mesure du temps plus régulière, de précision chronométrique. Breveté par Abraham-Louis Breguet en 1801, il fera l’objet de diverses variantes, démontrées et enseignées pour certaines dans les écoles d’horlogerie.
Le tourbillon de démonstration présenté ici a été réalisé par Jämes César Pellaton (1873-1954), fils de Fréderic Albert Pellaton (1832-1914), lui-même réputé pour la fabrication de montres de poche à tourbillon. Après s’être formé auprès de son père, Jämes Pellaton est engagé par l’entreprise horlogère Ulysse Nardin, avant de rejoindre en 1903 l’Ecole d’horlogerie du Locle. Enseignant des cours d’échappements puis sous-directeur chargé de l’enseignement pratique, il initiera ses élèves « les plus doués » (Ch.-A. Breguet, p. 219) à la fabrication de tourbillons – avant de devenir directeur de l’Ecole, de 1925 à 1939.
L’enseignement de Jämes Pellaton sera couronné de succès : le premier tourbillon de l’école, soumis en 1909 aux épreuves de l’Observatoire de Neuchâtel, obtiendra le premier prix de sa catégorie.
Le tourbillon se compose traditionnellement d’une cage tournant sur elle-même, dans laquelle sont réunis l’organe réglant (le balancier-spiral) ainsi que les organes de l’échappement. Cet ensemble effectue un tour par minute, à mesure que le pignon d’échappement s’achemine autour de la roue (fixe) des secondes. Ce faisant, le balancier-spiral effectue des rotations complètes tout en oscillant, ce qui a pour effet de compenser les effets de la gravité à son encontre, et ainsi, de réduire les écarts de marche entre les différentes positions verticales de la montre.
Le tourbillon dont il est question ici a été monté sur un mouvement de chronomètre de marine Ulysse Nardin. Il est plus grand que les tourbillons de montres de poches, et comporte un échappement à détente (typique des chronomètres de marine).
La platine sur laquelle il est monté porte l’inscription : « Création Jämes C. Pellaton DR H.C. Le Locle[.] Don du Syndicat Patronal des Producteurs de la Montre au Musée d’Horlogerie de La Chaux-de-Fonds[.] 1946 », le monogramme « JCP » ainsi que le numéro « 6172 ».
En marge de ses activités principales (de défense des employeurs et de leurs intérêts industriels et commerciaux), le Syndicat Patronal des Producteurs de la Montre (1918-1999) se soucie à plusieurs reprises de formation horlogère. En 1946, lorsqu’il fait don de ce modèle de tourbillon signé « Pellaton » au Musée d’horlogerie de La Chaux-de-Fonds, il se peut qu’il espère faire conserver (tout en y associant son nom) un témoin des dispositifs de grande qualité employés pour l’enseignement horloger dans la région. A moins qu’il ne souhaite tout simplement offrir aux visiteurs du musée l’occasion d’apprendre ce qu’est un tourbillon ? Dans les écoles en tout cas, de tels instruments de démonstration permettaient aux élèves de compléter par des savoirs plus intuitifs les connaissances acquises sur la base des dessins et des explications des manuels horlogers.
[s.a.], « Une intéressante initiative du Syndicat patronal des Producteurs de la Montre : Vers l’ouverture d’un atelier pour la formation d’horlogers sur les parties de la terminaison », L’Impartial, 23.09.1958, pp.1-2.
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Breguet, Charles-André, « Une carrière intense », in : Dix écoles d’horlogerie : Chefs-d’œuvre de savoir-faire, Neuchâtel : Ed. Simonin, 2010, pp. 219.
Cardinal, Catherine, Piguet, Jean-Michel, Catalogue d’œuvres choisies, La Chaux-de-Fonds : IHT, 1999, p.308, notice n°412.
Chapuis, Alfred, Grands artisans de la chronométrie. Histoire de l’horlogerie au Locle, Neuchâtel : Editions du Griffon, 1958, p. 177 ; 219.
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Registre du commerce, CH-645.0.201.009-9.
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