Les vestiges d’une occupation romaine sont signalés à Colombier à la fin du 18e siècle. La villa, située sous l’emplacement du château, est fouillée dans le courant des 19-20e siècles, notamment par Frédéric Dubois de Montperreux (1840-1843) et Charles-Henry Matthey (1908-1934). La documentation qu’ils élaborent est exceptionnelle, même si seuls les matériaux architecturaux (pierre, terre cuite, mortier) et le mobilier considéré comme précieux (fragments de céramique sigillée) sont observés, documentés et parfois conservés.
La villa de Colombier est construite entre le 1er et le 3e siècle ap. J.-C. Il s’agit de l’une des plus grandes et importantes villas découvertes au nord des Alpes, avec celle d’Orbe-Boscéaz. Ses imposantes dimensions (espace de 5000 m2, façade monumentale de plus de 100 mètres de long), tout comme les vingt-cinq groupes décoratifs de peinture murale et les onze tapis différents de mosaïque utilisés, révèlent le statut socio-économique élevé de ses propriétaires.
Concernant les peintures murales, trois grands ensembles de fragments ont été identifiés, en fonction de la composition de leur mortier, ainsi que vingt-cinq groupes décoratifs, soit autant de pièces peintes ornées à des périodes différentes. Parmi ces ensembles, trois types de parois, datées entre la fin du 1er siècle et le 3e siècle ap. J.-C., ont pu être reconstituées. Elles sont visibles dans l’exposition permanente du Laténium.
Le premier décor est daté du troisième quart du 1er s. ap. J.-C. Sur un fond jaune, une figure féminine ailée est posée sur une ombelle de candélabres. Des édicules (petites constructions) occupent la zone médiane de la paroi et des imitations de placages de marbre constituent la partie basse.
Daté du début du 2e siècle ap. J.C. et illustrant un choix courant dans nos régions, le deuxième type de décor est composé de panneaux rouges et d’inter-panneaux noirs, décorés de hampes à ombelles ou de tiges croisées en zone médiane, associées à des carreaux et des touffes de feuillages dans la partie inférieure.
Enfin, le troisième décor, réalisé au 3e siècle ap. J.-C., consiste en un fond blanc, sur lequel sont dessinés des bandes rouges et des hampes végétales.
On oublie que les mondes grec et romain étaient entièrement colorés : mosaïques, peintures murales, décorations des temples, sculptures, etc. La disparition des couleurs due a? leur fragilité? nous laisse une vision erronée, en noir et blanc, du passe?. La peinture romaine est bien documentée grâce aux conditions uniques de préservation des cités ve?suviennes de Pompe?i, Herculanum, Stabies et Oplontis. L’étude de ces sites a permis de proposer un classement de la peinture murale en quatre styles, échelonnés entre le 2e siècle av. J.-C. et l’éruption du Vésuve en 79 ap. J.-C. Ainsi, même si de petits fragments sont retrouvés, il est possible, d’après les modèles connus, d’en proposer des reconstitutions à l’échelle d’une pièce et de les dater.
Quant à la villa de Colombier, des analogies troublantes existent avec le palais dit de Derrière-la-Tour à Avenches. En effet, les deux établissements présentent un plan, une évolution architecturale et des décors très proches. Par exemple, les plus grandes mosaïques du deuxième état architectural de la résidence de Colombier évoquent les motifs de la mosaïque de Bacchus et Ariane du Palais de Derrière-la-Tour. Dans ce même palais, les murs du triclinium (salle à manger de réception) sont peints de panneaux rouges et d’inter-panneaux noirs ornés de colonnes à tenons juxtaposés, soit le même type de décor que celui identifié à Colombier. Aujourd’hui, il est presque certain que ces deux villas ont eu les mêmes propriétaires aux 2-3e siècles ap. J.-C. : la famille avenchoise des Otacilii, qui monopolisait les mandats politiques locaux et les fonctions religieuses majeures. Colombier aurait alors fonctionné comme la maison de campagne d’un riche citadin avenchois sur la riviera neuchâteloise.