Jusqu’au XIXe siècle, le chocolat est consommé presqu’exclusivement sous forme de boisson, ou dans des crèmes et des pâtisseries. Les fèves de cacao sont importées d’Amérique du Sud. Elles sont torréfiées et broyées avant d’être mélangées à du sucre, de la vanille et de la cannelle. Râpé, le chocolat est ensuite dissout dans la chocolatière avec de l’eau ou du lait. Si quelques particuliers préparent eux-mêmes leur chocolat, ce sont principalement les pharmaciens qui le fabriquent et le commercialisent dans la Principauté de Neuchâtel. Au tournant des XVIIIe et XIXe siècle, les confiseurs reprennent cette activité. Dès 1826, Philippe Suchard inaugure une production à caractère industriel.
Cette chocolatière en argent, prévue pour le service, a conservé les trois pieds qui permettent de la poser sur un réchaud. Le manche en bois est rattaché latéralement à la panse. Elle possède un bec rapporté fermé par un couvre-bec à charnière muni d’une graine. Le couvercle à charnière en forme de dôme aplati possède à son sommet une ouverture pivotant sur un axe décentré : cela permet d’y faire passer le moussoir, petit moulinet souvent en buis qui permet de brasser le chocolat pour l’homogénéiser et lui donner tout son arôme.
Alors que le café gagne dès la fin du XVIIIe siècle les classes populaires, le chocolat reste longtemps le privilège des milieux aisés de la société neuchâteloise, comme en témoigne la réalisation soignée des chocolatières de l’époque. Son prix élevé en reste la principale cause : il faut débourser entre 14 et 21 batz (soit le prix d’un repas dans la meilleure auberge de Neuchâtel) pour obtenir une livre de chocolat, ce qui permet d’obtenir 12 tasses. Certains voient dans ce luxe une dépense inutile et condamnable. En octobre 1765, le Journal helvétique dénonce le fait qu’un « usage si étendu d’une marchandise qui ne sert presque qu’à flatter les sens est incontestablement dans notre position un luxe effréné, pernicieux ».
Schlup, Michel, Le mangeur neuchâtelois au temps des Lumières (1730-1800), Neuchâtel : Nouvelle Revue Neuchâteloise, 2003, pp. 108-110, 114-116, 165.
Dr Guillaume, « Notice historique sur l’introduction de l’usage du café, du thé et du chocolat dans le canton de Neuchâtel », Musée neuchâtelois, 1875, pp. 5-10, 29-37, 60-67.