Les années 1930, marquées par les tensions internationales, voient la politique neuchâteloise se durcir. A la surprise générale, les communistes du Locle et de La Chaux-de-Fonds remportent chacun cinq sièges aux élections communales de 1935, provoquant l’inquiétude des partis nationaux. Ces derniers fondent, le 16 janvier 1937, le Comité cantonal de l’action neuchâteloise contre le communisme. Le Dr Eugène Bourquin, médecin et député libéral, en est nommé président. Le 25 janvier 1937 est organisée une conférence de J.-M. Musy pour démontrer que le communisme est impossible en Suisse. Des heurts éclatent à la sortie entre les Jeunesses communistes et les Jeunesses nationales. Dans la bousculade, Eugène Bourquin succombe à une crise cardiaque. Ses partisans affirment qu’il s’agit d’un assassinat.
Les obsèques du Dr Bourquin, en janvier 1937, sont l’occasion d’une large mobilisation politique des partis de droite. Le cortège funèbre traverse la ville, escorté par les Jeunesses nationales (en gabardine et béret) qui font office de service d’ordre, et par la police de La Chaux-de-Fonds en uniforme. Plusieurs représentants des autorités politiques locales et cantonales sont présents. Comme l’indique la bannière déployée, une délégation du parti genevois de l’Union nationale est présente, ainsi que d’autres groupes d’extrême-droite suisse.
Cet événement provoque une vive émotion dans l’opinion neuchâteloise. La presse de droite, notamment La Feuille d’Avis de Neuchâtel ou l’Effort, attribuent la responsabilité du décès du Dr Bourquin aux communistes, contredisant les conclusions du rapport d’autopsie du Dr. Wegelin décelant chez Bourquin une myocardite chronique sans lien possible avec d’éventuels coups reçus. Quelques mois plus tard, lors d’une votation populaire organisée le 25 avril 1937, la population neuchâteloise se prononce à une large majorité (67%) pour l’interdiction du Parti communiste. Les cantons de Genève et de Vaud prennent rapidement des décisions similaires, avant que le Conseil fédéral n’interdise à son tour le Parti communiste en 1940.
Caillat, Michel, Cerutti, Mauro, Fayet Jean-François, Roulin Stéphanie (éd.), Histoire(s) de l’anticommunisme en Suisse, Zürich : Chronos, 2009.
Histoire du Pays de Neuchâtel, tome III, Hauterive : Ed. Gilles Attinger, 1993, pp. 79-80.
Joseph, Roger, L’union nationale 1932-1939, un fascisme en Suisse romande, Boudry : A la Baconnière, 1975.