Le succès du daguerréotype, suivi quelques années plus tard de l’invention du négatif sur verre va amener à une diffusion toujours plus large de la photographie dans la seconde moitié du 19e siècle. Plusieurs artistes, pressentant son développement futur, se tournent vers ce nouveau média et prennent le titre de « peintre-photographe » ou « artiste-photographe ». De nombreux studios voient le jour dans le canton de Neuchâtel. A La Chaux-de-Fonds, Louis Colin possède le sien à la rue de l’Hôpital (rue Numa-Droz actuelle). Il y reçoit une clientèle bourgeoise et pratique le portrait en intérieur dans des mises en scènes propre à cette période. Les portraits individuels en buste constituent une bonne part de sa production photographique.
La plaque de verre impressionnée comporte deux prises de vues. Le modèle, dont le nom ne nous est pas parvenu, pose sans sourire, le buste légèrement de trois quart, le visage fixant l’objectif. Cette femme s’est habillée élégamment et coiffée soigneusement pour se présenter sous son meilleur jour. Par de légères retouches à l’aquarelle effectuées directement sur la plaque, le photographe a estompé les rides et les imperfections du visage. Le temps et les manipulations ont parfois occasionné de petits accrocs à la couche de collodion recouvrant le verre, créant ces tâches noires et ces craquelures visibles sur la photographie.
A la fin du 19e siècle, les photographes jouent le même rôle que les peintres-portraitistes et adoptent les normes esthétiques de cet art. La retouche fréquente des négatifs permet d’idéaliser la personne représentée et d’adoucir le rendu parfois trop exact de la photographie. Certaines retouches ont parfois lieu directement sur le tirage, permettant de retrouver l’unicité et la rareté que n’a plus la photographie par rapport à la peinture. La clientèle bourgeoise rassemble ces photographies dans des albums ad hoc permettant de les y insérer facilement. Ainsi se créent les premiers albums de famille.
Lavédrine, Bertrand, (re)Connaître et conserver les photographies anciennes, Paris : Comité des travaux historiques et scientifiques, 2007, pp. 122-135.
Rodeschini, Christine, « Le Fonds Louis Colin », in : Traces, 100 ans de patrimoine photographique en Suisse, Neuchâtel : Institut suisse pour la conservation de la photographie, 2004, pp. 26-31.
Fonds Louis Colin.
La médiathèque de l’architecture et du patrimoine: techniques photographiques.