Le site de Pont de Thielle a été découvert en 1969, lors de la 2e Correction des Eaux du Jura, à la hauteur du château de Thielle et à proximité du canal du même nom.
On a retrouvé deux maisons construites sur terre ferme, contenant chacune un foyer, ainsi qu’une palissade mise au jour sur 24 mètres. Ces structures appartiennent à un village bordé à l’est par un ruisseau, et par la palissade au nord. La dendrochronologie date l’occupation du village entre 2789 et 2701 av. J.-C. Il a été détruit à deux reprises par deux incendies, précisément datés en 2770 et en 2736 av. J.-C.
L’abandon du village de Pont de Thielle coïncide avec celui d’autres villages lacustres contemporains, laissant à penser qu’une forte transgression lacustre a forcé les habitants à quitter les bords des lacs. Une épaisse couche de limon recouvre directement la couche archéologique, confortant l’hypothèse d’une rapide remontée des eaux.
L’aiguille courbe comporte une tête perforée, d’où son nom d’aiguille à bélière. Elle a été confectionnée dans un andouiller de bois de cerf (pointe de la ramure), dont on a mis à profit la courbure naturelle.
D’après les expérimentations réalisées, on pense que les ramures de cerfs étaient placées au préalable dans l’eau durant plusieurs jours avant d’être travaillée. Ceci était fait pour des bois secs, afin leur redonner leur élasticité et pour les tronçonner. Ensuite, le bois était segmenté au ciseau de pierre ou d’os. La pointe d’andouille était mise en forme puis polie à l’aide d’outils en silex et de blocs de grès.
Les hommes du Néolithique ont su tirer parti des propriétés physiques particulières du bois de cerf. En effet, il a la particularité de présenter des zones dures et compactes – utilisées pour la partie active des outils tels que pointes, tranchants – et d’autres spongieuses – utilisées pour les manches et gaines de haches ainsi que pour la perforation d’autres matériaux –.
Les aiguilles à bélières sont propres à la civilisation de Lüscherz (2’800-20700 av. J.-C.) et essentiellement répandues dans la région des lacs jurassiens suisses. Une culture archéologique se comprend au sens de groupes humains ayant une culture matérielle spécifique partagée, dont la céramique est souvent l’un des éléments les plus distinctifs. Dans le cas des groupes du Lüscherz, il s’agit d’une céramique très grossière à fonds épais ronds ou aplatis, décorée de mamelons ronds et de petites pastilles aplaties et appliquées sous le bord des vases.
Plusieurs hypothèses fonctionnelles ont été émises pour l’aiguille à bélière, la première étant celle d’une aiguille à filocher. Mais celle-ci est remise en question, d’abord par une enquête menée dans les années 1980 autour du lac de Neuchâtel. De vieux pêcheurs ont été interrogés au sujet de cette aiguille : aucun ne la connaissait ni ne l’aurait utilisée pour réparer des filets de pêche. Des essais d’utilisation d’une aiguille à bélière pour les filets de pêche ont démontré que la bélière gênait plus qu’elle ne facilitait le travail. Le lustré que présentent les aiguilles pourrait être le résultat de passages répétés entre les tiges de couverture des maisons néolithiques ; elles auraient ainsi servi à tenir les roseaux entre eux au moyen de cordelettes.
Une deuxième hypothèse propose de considérer ces aiguilles comme des épingles vestimentaires. Les micros-traces observées sur ces objets montrent en effet un contact répété avec le cuir, mais les lanières de cuir pourraient entourer l’andouiller pour une utilisation autre que vestimentaire. C’est ce que suggère une troisième hypothèse, qui interprète ces artefacts comme étant des poignées de portage, telles qu’on en connaît en ivoire et en bois de renne chez les Inuits. Leur fonction reste donc encore pour l’heure sujette à discussion !