Durant toute la première moitié du 18e siècle, le monde littéraire neuchâtelois reste discret et plutôt tranquille. La polémique, la satire ou la critique sont absentes de la prose des auteurs neuchâtelois. Malgré l’ouverture aux Lumières, le conformisme et le manque d’originalité sont plutôt la règle.
La situation change quelque peu dans la deuxième moitié du siècle. Marianne Moula ou César-Henri Monvert s’essayent à la caricature dans des techniques différentes. Louis de Meuron, à côté des ses occupations politiques, est actif dans le domaine culturel. Sa nécrologie, parue dans Le Véritable Messager boiteux de Neuchâtel en 1849 souligne « les réparties promptes d’un esprit fin et vif » ainsi que « sa conversation qui se distinguait par des observations piquantes ». Il fait usage de ces qualités en croquant d’un trait vif une série de portraits représentant des personnalités qu’il recueille dans un petit carnet.
Comprenant 70 feuillets, ce recueil de dessins est relié en maroquin rouge. Il porte un ex-libris manuscrit permettant de connaître avec précision son propriétaire : « de Meuron, maire de Bevaix ». Le recto des feuillets comporte une série de 58 paysages représentant des monuments et des sites neuchâtelois et suisses. Sur le verso de feuillet, l’auteur a collé une suite de 61 portraits, en majorité de personnalités neuchâteloises, réalisés à l’aquarelle sur du papier bleu ou beige. Tous sont datés. La colle utilisée a, avec le temps, traversé le papier et forme quatre taches aux angles de la feuille.
Le passage de Rousseau dans la Principauté sert-il de déclencheur ? La seconde moitié du 18e siècle voit plusieurs écrivains exercer leurs talents à Neuchâtel en bousculant l’orthodoxie. Abram Pury (1724-1807) publie en 1767 les Lettres d’un bourgeois de Valangin ; Isabelle de Charrières fait paraître ses Lettres neuchâteloises en 1784 ; Mathieu-César d’Ivernois écrit à la même époque plusieurs pièces versifiées.
Dans le même temps, la scène artistique locale s’anime à travers plusieurs figures : Jean-Pierre Preudhomme, David-Alphonse de Sandoz-Rollin et Josef Reinhardt ouvrent la voie à leurs successeurs, Maximilien de Meuron et Léopold Robert parmi d’autres.
Dans cet essor créatif, la caricature trouve un terreau fertile pour s’épanouir, quoique qu’elle reste souvent prudemment cantonné au domaine privé.
Klauser, Eric-André, Galerie de portraits neuchâtelois de la fin du XVIIIe et de la première moitié du XIXe siècle, Neuchâtel : Nouvelle revue neuchâteloise, no 67-68, 2000.
Bibliothèque et musées, 1996, pp. 32-34.
Perriard, Myriam Volorio, « Meuron [de] », in : Dictionnaire historique de la Suisse (DHS).