Au printemps 1848, l’Europe est le théâtre de plusieurs mouvements révolutionnaires, dont la plupart n’aboutissent pas. La crise économique et sociale a favorisé la diffusion des idées républicaines et des troubles agitent Paris, la Lombardie et les Etats allemands. La nouvelle du soulèvement parisien parvient dans les Montagnes neuchâteloise le 26 février 1848 et donne l’impulsion décisive au mouvement républicain du lieu. Arborant les couleurs fédérales, les Républicains s’emparent le 1er mars du château de Neuchâtel et mettent fin à l’Ancien Régime. Plusieurs journaux européens rendent comptent de ces événements. Une gravure, parue à Leipzig dans l’Illustrierte Zeitung du 11 mars 1848, montre la prise du château de Neuchâtel.
La colonne révolutionnaire arrive à Neuchâtel. Les hommes qui la composent, gesticulants, sont vêtus de jaquettes ou de blouses, coiffés de casquettes ou de chapeaux hauts de forme. Ils sont armés de fusils surmontés de baïonnettes, certains de gourdins ou de hallebardes. Tous se dirigent vers le centre de Neuchâtel. La tour des Chavannes, le Collège latin et la tour de Diesse émergent de la masse des toits. L’artiste a exagéré l’importance du château, symbole du pouvoir, dont la silhouette domine toute la scène. La vue est prise depuis le chemin de la Boine ou du Pertuis-du-Sault, et le calme paysage lacustre contraste avec le premier plan.
L’Illustrierte Zeitung du 11 mars 1848 est presque entièrement consacré aux événements révolutionnaires européens. Si le texte qui commente la Révolution neuchâteloises ne s’étend que sur 22 lignes, l’illustration d’une demi-page lui donne beaucoup plus d’importance. L’artiste s’est probablement inspiré d’une gravure existante de Neuchâtel, peut-être la vue de Gustav Adolph Müller publiée en 1838 dans l’ouvrage Die klassischen Stellen der Schweiz und deren Hauptorte. Il y a simplement ajouté la scène du premier plan. La manière dont sont vêtus les personnages veut désigner le côté populaire de la révolution. Cette vue est republiée quelques mois plus tard dans un supplément de l’Illustration de Paris du 12 août 1848. Mais la rédaction parisienne légende son image « Combat des montagnards de Nuremberg », confondant Neuchâtel avec la ville allemande.
La mémoire de la Révolution neuchâteloise de 1848, Ed. Attinger, 1997, pp. 10-11.
Courvoisier, Jean, « Neuchâtel pris pour Nuremberg en 1848 », Revue historique neuchâteloise, 1998, pp. 183-186.
Allanfranchini, Patrice, Neuchâtel 1642-1942, Trois siècles d’iconographie, Chézard-Saint-Martin : Ed. de la Chatière, 2005, p. 254 (notice 569).
Histoire du Pays de Neuchâtel, tome II, Hauterive : Ed. Gilles Attinger, 1991, pp. 31-34.