Ce cadeau fastueux doit son existence à la visite qu’effectue le prince Guillaume, futur Frédéric-Guillaume IV, à Neuchâtel en 1819.
Le prince s’était déjà rendu dans la principauté en juillet 1814, en compagnie de son père, Frédéric Guillaume III. Durant cette première visite, ils furent reçus par l’un des hommes politiques les plus importants de Neuchâtel, le conseiller d’État Louis de Pourtalès. Suite à cette seconde visite, le prince Guillaume fait remettre à Louis de Pourtalès ce service à café en porcelaine.
Ce service est composé de six tasses avec leurs soucoupes. Chaque pièce a été peinte à la main, avec une grande finesse. Les dorures, réalisées à base de poudre d’or, encadrent de véritables paysages miniatures. On y reconnaît des paysages suisses, principalement alpins (Andermatt, Gothard, Mont Blanc), mais aussi une vue de la ville de Neuchâtel. Les soucoupes sont décorées de couronnes de feuilles de chêne, de lauriers-roses, ou encore de rivières.
Ces différents éléments évoquent de manière pittoresque une partie du voyage que Frédéric-Guillaume III et le prince avaient fait dans l’Oberland bernois, au lendemain de leur séjour dans la principauté de Neuchâtel en juillet 1814; ils témoignent également du goût pour la nature, qui caractérise le début du 19e siècle. Il est intéressant de relever que les soucoupes comportent les noms des suivants du prince ; sur cinq de celles-ci figure, en outre, la date de 1819.
Les cadeaux de prestige, et surtout le don de porcelaine, constituaient une pratique courante sous l’Ancien Régime et au début du 19e siècle. Suite à sa victoire sur Napoléon, Frédéric-Guillaume III a offert d’importants services de porcelaine au duc de Wellington, héros de la bataille de Waterloo, ainsi qu’à plusieurs autres généraux. Ces dons, d’une très grande valeur, étaient fort appréciés. Découvert pour la première fois en Chine, le secret de la fabrication de la porcelaine est longtemps resté un mystère en Europe. Les travaux de l’alchimiste allemand Johann Friedrich Böttger, au début du 18e siècle, amènent sa découverte. En parallèle, on découvre les premiers gisements de kaolin, matière première indispensable à la pâte dure.
Plusieurs manufactures se créent en France, dans les États allemands et en Italie. Celle de Berlin, la Königliche Porzellan-Manufaktur (KPM), fondée en 1751, compte parmi les plus importantes. Édifiée par un particulier, elle connaît de graves difficultés financières avant que le roi Frédéric le Grand ne décide de la racheter pour en faire une manufacture royale qui connaîtra un grand succès.
Badoud, Jean G., Leur souvenir de Neuchâtel, Messeiller: Neuchâtel, 2001.
Das Tafelservice der KPM für den Herzog von Wellington, Catalogue d’exposition, Berlin : Schloss Charlottenburg, 1988.
Ducret, Siegfried, Porzellan der europäischen Manufakturen im 18. Jahrhundert, Zurich : Silva Vertrag, 1971.
Jedding, Hermann, Europäische Porzellan, München : Keysersche Verlagsbuchhandlung, 1974.
Jequier, François, « Louis de Pourtalès, Conseiller d’Etat, diplomate (1773-1848) », in : Biographies neuchâteloises, Hauterive : Éditions Gilles Attinger, t. 2 : Des Lumières à la Révolution, 1998, pp. 263-267.
KPM Welt, Catalogue d’exposition, Berlin : Königliche Porzellan-Manufaktur, 2007.
Massenbach Louis Ferdinand von, Die Hohenzollern, einst und jetzt, Bonn : Verlag Tradition und Leben, 2011.
Perregaux-Gaudot, Charlotte, « Lettres de Mme de Perregaux-Gaudot sur le séjour du prince royal de Prusse à Neuchâtel en 1819 », Musée neuchâtelois, 1910, pp. 261-268.
Dossier scientifique réalisé par Claude-Alain Kuenzi conservé au département des arts appliqués du Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel.
Dossier d’œuvre conservé au département des arts appliqués du Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel.