Werner Jacot (1899-1983) et Alex Jacot (1906-1979) sont tous deux nés à la Chaux-de-Fonds. Après avoir abandonné la paysannerie, Werner suivit un apprentissage de sculpteur sur bois puis se lança en autodidacte dans la lutherie. Il forma son frère cadet qui devint son associé. En 1927, un violon des luthiers Jacot obtint la médaille d’argent à l’exposition internationale de lutherie de Genève. La crise économique poussa les deux artisans à quitter leur atelier chaux-de-fonnier. Après un passage à Grandson, ils s’installèrent aux Bayards en 1944 et y demeurèrent jusqu’en 1977. Ils passèrent leurs dernières années dans leur ville natale, auprès de leurs neveux.
Suite au prix obtenu à Genève, les frères Jacot commandèrent ce film publicitaire, dont la durée permettait probablement une projection en avant-programme. On peut attribuer la réalisation de cette commande à Etienne Adler, seul réalisateur professionnel installé à La Chaux-de-Fonds durant le premier tiers du 20e siècle et à qui l’on doit notamment « La vie d’un ouvrier dans les Montagnes neuchâteloises » (1931). Le fils d’Adler portait en effet le nom de Georgy, tout comme le jeune héros du « Violon cassé ».
Le « violon cassé », c’est celui du petit Georgy, parti récolter quelque argent, à l’aide de son instrument, pour sa grand-mère et lui. Un passant, ayant écrasé son violon par mégarde, l’emmène chez les luthiers Jacot pour lui en offrir un neuf. Grâce à cet instrument de qualité, sa prestation devant la Fontaine monumentale de La Chaux-de-Fonds lui permettra de rentrer les poches pleines. Il fait à sa grand-mère ravie le récit de ses aventures. Les dernières images du film montrent Georgy, élégamment vêtu, avec son violon sur une scène.
Les frères Alex et Werner Jacot, personnalités réservées et secrètes, apparaissent à deux reprises au sein du patrimoine cinématographique neuchâtelois: en 1927, en tant que commanditaires du « Violon cassé » puis, quelques décennies plus tard, dans un film d’André Paratte, « Le rossignol de Sibérie » (1964), portrait musical des deux artisans décrivant les étapes de la fabrication d’un violon. Le titre du film de Paratte reprend celui d’un texte consacré aux luthiers Jacot par leur cousin le poète Arthur Nicolet (1912-1958).
Joseph, Aude, Neuchâtel, un canton en images : Filmographie tome 1 (1900 – 1950), Hauterive, Gilles Attinger, 2008, pp. 81-83.
Joseph, Aude, Neuchâtel, un canton en images : Filmographie tome 2 (1950 – 1970), à paraître.
Neeser, Caroline, « Inventaire du patrimoine cinématographique neuchâtelois : le rôle du Département audiovisuel (DAV) », Musée neuchâtelois, 1995, p. 234 et p. 243.
Lebet, Claude, A cordes et à vent: les facteurs d’instruments dans le pays de Neuchâtel hier et aujourd’hui, Hauterive, Gilles Attinger, 2002, p. 76.
Rodeschini, Christine ; Neeser, Caroline, « Image d’un film: un film publicitaire de 1927 », L’Impartial, 22.4.2002, p. 16.