Ami Girard est né en 1819 à Chézard-Saint Martin dans une famille profondément républicaine. Son père tient une auberge à Renan (BE). C’est le lieu de ralliement des Neuchâtelois que les événements de 1831 ont forcés à s’exiler dans le vallon de Saint-Imier. Après des études commerciales, Ami Girard entame une carrière militaire dans l’armée fédérale et participe, notamment, à l’occupation de l’Argovie au moment de l’affaire des couvents en 1841 et à la campagne du Sonderbund en 1847. Averti le 29 février 1848 par des amis chaux-de-fonniers de ce qui se passe dans les montagnes neuchâteloises, il réunit rapidement 200 volontaires dans le vallon de Saint-Imier, parmi lesquels se trouvent une quarantaine de Neuchâtelois. Ils quittent Renan pour La Chaux-de-Fonds, puis repartent sans attendre sur Neuchâtel avec les troupes des montagnons. Le 1er mars 1848, ils s’emparent sans coup férir du château de Neuchâtel et proclament la République. Ami Girard devient successivement membre du Grand Conseil neuchâtelois, préfet de La Chaux-de-Fonds et conseiller d’Etat. Il obtient le grade de colonel dans l’armée fédérale.
Ami Girard est représenté vers l’âge de 80 ans, peu de temps avant sa mort en avril 1900. Il est vêtu de son grand uniforme à revers croisés. Les galons figurant sur ses épaulettes et son képi signalent son grade de colonel fédéral. Sa main gauche gantée de blanc tient un sabre au pommeau ouvragé. Sa main droite repose sur une carte de la Suisse, mettant en évidence le canton de Neuchâtel, lieu des événements de 1848. La signature de l’artiste figure sur le bord de la table, à droite. Ce tableau a été donné par la famille Girard à la République de Neuchâtel.
En signant ce portrait hiératique d’Ami Girard, le peintre Jules Blancpain s’inscrit dans une vision presque allégorique de son sujet. Ami Girard, représenté à un âge avancé, symbolise à lui seul le peuple neuchâtelois fier et déterminé, victorieux dans sa lutte pour la liberté. Le fond clair et lumineux semble l’auréoler de gloire. Le peintre a ainsi préféré l’allusion et le symbole pour signifier le rôle joué par Ami Girard dans la révolution de 1848, plutôt que de représenter les événements eux-mêmes. Car que représenter ? La manière pacifique dont s’est déroulée la révolution neuchâteloise prive le peintre de scènes de batailles ou de moments héroïques. Ne lui reste que le portrait pour tenter, malgré tout, de transmettre la grandeur de l’événement.
Girard, Ami, « Campagnes des volontaires erguelliens en 1848 dans le Pays de Neuchâtel ayant pour objet d’y renverser le régime royaliste; Prise d’armes erguellienne contre la partielle domination prussienne en Suisse », Actes de la Société jurassienne d’émulation, 1898, pp. 169-200.
Gerber, Robert, « Ami Girard et ses volontaires », Musée neuchâtelois, 1948, pp. 97-114.
La mémoire de la révolution neuchâteloise de 1848, Hauterive : G. Attinger, 1997, p. 185.