Le droit est une discipline bien représentée dans la Principauté de Neuchâtel au XVIIIe siècle : Abraham Martenet (1677-1750), Jacques-François Boyve (1692-1771) ou Etienne Meuron (1675-1750) sont des juristes neuchâtelois réputés. Emer de Vattel (1714-1767), tout en s’inspirant des théories de Grotius et de Wolff, renouvelle l’étude du droit et sert de charnière entre le classicisme et le modernisme. Son ouvrage Le Droit des gens, paru en 1758, pose des principes nouveaux qui serviront de référence pendant près d’un siècle.
Le Droit des gens forme deux volumes in-quarto faisant au total plus de 800 pages. Tiré à 1200 exemplaires, l’ouvrage est décoré de plusieurs bois imprimés en bandeau (ornements en tête de page) ou en cul-de-lampe (en bas de page) et bénéficie d’une mise en page soignée. L’édition est disponible sur trois types de papier, fort, fin et extra-fin. Bien que la page de titre porte l’adresse de Londres, le Droit des gens a bien été imprimé à Neuchâtel, probablement chez l’imprimeur du Mercure suisse, Abraham II Droz.
La fausse adresse de Londres est quelque peu étonnante, le contenu de l’ouvrage, malgré sa nouveauté, n’étant pas de nature à faire craindre la censure. Peut-être faut-il y voir un hommage à une nation qu’Emer de Vattel tient en haute estime.
Cet ouvrage constitue un apport essentiel dans l’histoire du droit international. Ecrit en français et non plus en latin, il est le premier à se pencher sur le droit des gens considéré comme une entité propre. Il place la nation au-dessus du souverain et affirme l’égalité des Etats. Son style clair et précis et les nombreux exemples tirés de l’histoire moderne font rapidement de cette étude une référence internationale qui est utilisée dans la pratique diplomatique et le règlement des différents internationaux jusqu’au XIXe siècle. Le Droit des gens, très vite réédité et traduit dans plusieurs langues, connaît un succès particulier en Angleterre et aux Etats-Unis.
Thévennaz, Henri, « Emer de Vattel : pour le deuxième centenaire du Droit des gens », Musée neuchâtelois, 1958, pp 129-135.
L’édition neuchâteloise au siècle des Lumières : la Société typographique de Neuchâtel (1769-1789), recueil d’études publié par Michel Schlup, Hauterive : Gilles Attinger, 2004, pp. 48-52.
Jelmini, Jean-Pierre, Neuchâtel 1011-2011, mille ans – mille questions – mille et une réponses, Hauterive : Ed. Attinger SA, 2010, p. 496.