Fils de l’imprimeur Samuel Fauche, Abraham-Louis travaille d’abord chez son père entre 1782 et 1786, avant de s’établir à son compte en 1787. Un grand nombre d’ouvrages sortent de ses presses. Attaché à l’ordre établi, il réprouve les mouvements révolutionnaires français de 1789 et s’engage au service de la Contre-révolution. A partir de 1790, il met son imprimerie à disposition des émigrés français qui affluent à Neuchâtel et publie une quarantaine d’ouvrages en faveur de la royauté. La neutralité de Neuchâtel dans le conflit entre la France jacobine et les Puissances coalisés obligent Fauche-Borel à publier ces pamphlets clandestinement. En 1795, il entame une carrière d’agent secret au service des Bourbons, sillonnant sans beaucoup de succès l’Europe pour la cause contre-révolutionnaire. A la Restauration, oublié des princes qu’il avait servi, il rédige et publie ses Mémoires, avant de se donner la mort à Neuchâtel en se jetant de la fenêtre de sa maison.
Assis sur une chaise, Abraham-Louis Fauche-Borel est accoudé à une table, dans un intérieur décoré de portraits et de bustes. Il désigne du doigt le portait encadré de Frédéric-Guillaume III. Sur sa droite figurent les bustes de Louis XVIII et du prince de Condé. Au mur sont accrochés des portraits des généraux républicains Jean-Victor Moreau (1763-1813) et Jean-Charles Pichegru (1761-1804), gagnés à la cause royaliste. Posé sur la table, un petit ouvrage présente le portrait de son neveu, mort fusillé en 1807. Derrière-lui, une fenêtre laisse apercevoir les tours de la prison du Temple, à Paris, où il a été emprisonné entre 1802 et 1805.
Cette gravure a été éditée à Paris par le marchand d’estampes Chaillou-Potrelle. Elle résume emblématiquement le parcours de cet éditeur transformé en agent secret parfois naïf et maladroit. Les portraits rappellent ses missions : en 1795, il sert d’agent entre le prince de Condé et le général Pichegru, qui rejoint plus tard les rangs royalistes. La vue de la prison du Temple rappelle l’incarcération de Fauche-Borel pour conspiration. L’intervention du roi de Prusse permet sa libération. En 1807, tombant dans un piège, il envoie son neveu Charles Samuel Wittel à Paris où ce dernier est dénoncé et fusillé. Trahi, abandonné par ceux qu’il avait servi, ruiné et veuf, les dernières années de la vie de Fauche-Borel sont bien sombres. L’air las et résigné de son portrait exprime son état d’esprit avant son suicide.
Candaux, Jean-Daniel, « Abrahm-Louis Fauche-Borel, libraire-imprimeur et agent contre-révolutionnaire (1762-1829) », in : Biographies neuchâteloises, tome I, Hauterive : Ed. Gilles Attinger, 1996, pp. 90-96.
Schlup, Michel et Tissot, Pierre-Yves, Le Livre neuchâtelois 1533-1983, Neuchâtel : Neuchâtel : Comité de coordination du 450e anniversaire : Association suisse des arts graphiques : diffusion Bibliothèque publique et universitaire, 1983, pp. 43-45.
Courvoisier, Jean, « Fauche-Borel et le maréchal Berthier », Musée neuchâtelois, 1990, pp. 105-113.
Jelmini, Jean-Pierre, « Fauche, une dynastie d’imprimeurs-éditeurs », in : Neuchâtel 1011-2011, mille ans, mille questions, mille et une réponse, Hauterive : Ed. Gilles Attinger, 2010, pp. 196-197.
Cossy, Valérie, « Fauche [-Borel], Abraham Louis », in : Dictionnaire historique de la Suisse (DHS).
Fauche-Borel, Abrahm-Louis, Mémoires, Paris : Moutardier, 1829.