Au 16e siècle, Le Landeron est le chef-lieu d’une des quatre châtellenies du comté et jouit d’une relative autonomie politique et judiciaire. Assisté de douze notables issus de la bourgeoisie, le Châtelain, qui représente le pouvoir comtal et qui gère les aspects judiciaires et administratifs, rend la justice ordinaire pour le compte du seigneur à l’Hôtel de Ville, dont la construction commence vers 1450. Au fil du temps, le bâtiment de l’Hôtel de Ville remplira plusieurs autres fonctions : salle de justice, chapelle, four banal, salles de réception, grenier et encore dépôt de poudre à canon.
Une femme vêtue de rouge, un enfant agrippé à son cou, est agenouillée et tournée vers la droite. L’enfant est retenu au niveau du bras par un personnage armé et habillé en vert qui se tient derrière la femme. Un autre enfant, mort, gît à terre. A droite un personnage assis sur un siège avec une peau de lion, manie un sceptre et donne des ordres. A gauche enfin, un personnage en jaune regarde la scène.
La peinture est partiellement détruite : il ne reste en effet que la partie inférieure qui est relativement bien conservée. Cette fracture s’explique par un probable changement de décor mobilier de la salle: un élément en bois aurait caché la partie inférieure de la peinture, la protégeant, alors que la partie supérieure semble avoir été entièrement grattée. Cette hypothèse est créditée par la présence de chevilles en bois dans la partie détériorée.
Cette peinture murale représente le récit du Jugement de Salomon, tiré du premier Livre des Rois dans l’Ancien Testament. L’histoire qui y est racontée concerne le différend qui oppose deux femmes se disputant un enfant vivant. Pour régler le litige, le roi ordonne de couper l’enfant vivant en deux et d’en donner une moitié à chacune. L’une accepte mais l’autre préfère renoncer à l’enfant plutôt que de le voir sacrifié. En elle, Salomon reconnait la vraie mère et lui fait remettre le nourrisson. La lisibilité immédiate de ce programme iconographique est en totale adéquation avec la fonction de la salle : proverbiale, la sagesse du roi doit rappeler aux juges l’un des thèmes majeurs de la justice. Non seulement cette peinture exprime par l’image et sa symbolique, l’activité juridique dans l’entre-de-deux lacs durant le bas Moyen Age, mais elle s’inscrit dans une tradition décorative des hôtels de ville en Suisse au 16e siècle.
Bartolini, Lionel, Une résistance à la Réforme dans le pays de Neuchâtel. Le Landeron et sa région (1530-1562), Neuchâtel : Editions Alphil, 2006.
La Sainte Bible, Alliance biblique universelle, Genève 1988 : premier livre des Rois (3, 16-28).
Pradervand, Brigitte, Schätti, Nicolas, « Sculptures et peintures monumentales au landeron (XVe-XVIIe siècles) », in : Le Landeron.Histoires d’une Ville, Hauterive : Editions Gilles Attinger, 2001, pp. 43-60.