Durant tout le XIXe siècle, la gravure occupe une place importante dans le décor de la montre suisse. Genève possède depuis le XVIIIe siècle déjà une tradition dans ce domaine : on y recense 204 graveurs en 1788. A La Chaux-de-Fonds, le nombre de graveurs sur montre augmente régulièrement et atteint 600 en 1895. Les graveurs prennent parfois pour modèles des œuvres célèbres qu’ils reproduisent avec une grande précision. Ainsi en est-il de « L’arrivée des moissonneurs dans les marais pontins » peint par Léopold-Robert et gravé ici sur le fond d’un boîtier par Jules-Louis Jacot, né en 1826 au Locle.
Gravé par Jules-Louis Jacot, le fond du boîtier en or est orné d’une copie du tableau de Léopold Robert. Le cadran, en or guilloché de cercles concentriques, possède des chiffres romains en émail noir. Un paysage lacustre bordé de montagnes en orne la face. Le mouvement à 370 jours en laiton doré a été fabriqué par F. Bovet à Bienne. Il possède un long ressort-moteur dont le couvercle est gravé d’un décor nommé « mille-feuilles », très à la mode dans les années 1890.
Au début du XIXe siècle, Léopold Robert est au fait de sa renommée et ses œuvres sont souvent reprises par les décorateurs. « L’arrivée des moissonneurs », exposé au Salon de Paris en 1831 et aujourd’hui conservé au Musée du Louvre, est une œuvre complexe et de grande dimension. Sa reproduction miniaturisée, avec le rendu des ombres et la suggestion de la profondeur, requiert une grande habileté et beaucoup de minutie. Dans sa nouvelle André le graveur, publiée en 1875, Louis Favre (1822-1904) décrit la précision nécessaire à un tel travail : « L’œil à la loupe, la main ferme, il creuse dans le métal des traits à peine visibles. De temps à autre, il fait quelques pas dans sa chambre, se lave les yeux avec de l’eau fraîche, examine sa plaque d’or, la compare à la grande estampe des Moissonneurs de Léopold Robert, d’après Prévost, et reprend avec un nouveau courage son travail interrompu. »
Cardinal, Catherine, Piguet, Jean-Michel, Catalogue d’œuvres choisies, La Chaux-de-Fonds : Institut l’homme et le temps, 1999, pp. 216-217.
Bachelin, Auguste, L’horlogerie neuchâteloise, Neuchâtel: Attinger Frères, 1888, pp. 132-133.
Dossier documentaire, Musée international d’horlogerie de La Chaux-de-Fonds.