Il existe de nombreux portrait de Marie d’Orléans, duchesse de Nemours et princesse de Neuchâtel. Le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel en possède un qui est une réplique partielle (en buste) d’atelier. La première version pourrait être celle du duc de Luynes conservée au château de Dampierre ou bien celle du musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne.
La réplique est entrée dans les collections du Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel au début du 20e siècle grâce à un don de Mme Ibbetson (née Sandoz-Rollin). L’ancien fichier du musée (1928) mentionne sa provenance : le château de Beauregard, propriété des Sandoz-Rollin à Serrières. En 1865, selon le Catalogue de l’Exposition nationale en faveur des incendiés de Travers, ce tableau est alors propriété de Mlle Sandoz-Rollin, très probablement Caroline-Thérèse de Sandoz-Rollin, jamais mariée, descendante de François de Chambrier (1663-1730), maire de Neuchâtel.
Or selon Philippe Godet, la duchesse de Nemours fit don en 1706 de « son portrait peint par Hyacinthe Rigaud, qui se trouve maintenant au musée historique de Neuchâtel » à François de Chambrier (1663-1730), en récompense de ses bons et loyaux services (Portrait Neuchatelois, 1920, p. 10).
La duchesse de Nemours est représentée de trois-quarts, assise dans un fauteuil, le visage tourné vers le spectateur. Elle retient d’une main les pans d’une mante nouée autour de son cou. Les carnations blanches du visage et des mains du personnage se détachent dans un jeu de contrastes sur la grande masse noire de sa robe. Ainsi mises en valeur et éclairées par un habile effet de lumière, ces parties mettent l’accent sur le rang mais aussi le caractère du personnage représenté.
Le livre de comptes de Hyacinthe Rigaud fait mention, en 1705, du portrait de la duchesse de Nemours pour la somme de 700 livres; la même année, trois répliques «en grand» semblent avoir coûté 250 livres chacune (James-Sarazin 2008, cat. 284). Deux autres répliques sont indiquées dans le livre de raison, au prix plus modique de 100 livres (en 1705 et 1706). A l’année 1706, l’aide d’atelier B. Monmorency reçu 14 livres pour « une copie de Made de Nemours » et (à la ligne suivant) 16 livres pour « deux copies entières de Suisses pour Mr Chambrier » (Livre de Raison 1919, p. 129). Il semble dès lors légitime de penser que le tableau a été exécuté par cet artiste hollandais entré dans l’atelier de Rigaud en 1706 pour trois ans. On ne connaît de ce peintre que le portrait de l’armateur, conseiller et maire de Goes, Pieter Parker, peint en 1742 et conservé au Rijksmuseum d’Amsterdam (Perreau, 2013, p.33). Une certaine raideur dans le dessin, un traitement scolaire et un manque de précision dans les détails sont analogues à notre portrait.
Cette réplique témoigne ainsi de l’atelier de Rigaud conne une véritable « entreprise à produire des portraits », dont la qualité ainsi que le prix pouvaient être très variables.
Perreau, Stéphan, Hyacinthe Rigaud, Catalogue concis de l’œuvre, Montpellier: Nouvelles Presses du Languedoc, 2013, p. 193 cat. P.898.
Poulain, Bérangère, « Notice : Portrait de la duchesse de Nemours, 1705 », in: Frédéric Elsig (dir.), De la Renaissance au Romantisme, Peintures françaises et anglaises du Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne, 2013, pp. 52-56.