Les terres du village des Verrières, situées entre 900 et 1000 m d’altitude, ne se prêtent pas bien à la culture céréalière. Sur ces hauts plateaux, les paysans vivent de l’élevage et de la production laitière ainsi que de l’exploitation forestière. Un chroniqueur relève au 18e siècle déjà que « les fromages des Verrières se vendent avantageusement au dehors et produisent annuellement des sommes considérables ». Comme dans le reste de l’Arc jurassien, les activités de négoce et d’industrie s’y développent durant le 19e siècle et jusqu’à la fin des Trente glorieuses, favorisées par la proximité de la frontière française. Durant cette période, trois commerces familiaux de vins et de fromages, les maisons Landry, Hegi, et Martin, sont actives. Jérémie Louis Martin (1801-1881) est le fondateur de la maison du même nom. Arrivé de Sainte-Croix où il fut régent, puis horloger, il s’oriente vers le commerce et fonde sa propre entreprise en 1835. Très impliqué dans la vie publique, il possède les capitaux nécessaires au négoce d’import-export. D’impressionnantes caves, encore visibles dans le bâtiment Croix-Blanche 45 servent à l’affinage des fromages et à l’encavage de vins étrangers.
Cette grande boîte de bois était destinée à protéger une meule de gruyère d’environ 20 kg, pour l’exportation. Le fond et le couvercle, constitués de planchettes d’un centimètre d’épaisseur, en assurent la solidité. Le bord est fait de bois cintré. Sur le dessus, figurent, marquées au fer: la raison sociale du négociant (Jérémie Louis Martin) et les distinctions obtenues lors d’expositions. Au centre, trône une silhouette de vache.
Au milieu du 19e siècle l’agriculture fait d’importants progrès, particulièrement en matière d’affouragement et d’engrais. La production laitière augmente considérablement. La seconde moitié du siècle voit la naissance dans le canton de sociétés d’agriculture et de laiterie. Celles-ci contrôlent la qualité et la commercialisation de la production. De la fromagerie coopérative à la simple vente de lait à des négociants affineurs, plusieurs modèles commerciaux coexistent. Dans un contexte plus large, l’élevage se répand en plaine au détriment des régions de montagne. Dès les années 1860, l’accroissement de la production permet de satisfaire à la demande de l’étranger. On exporte vers la France, l’Italie et outre-mer. Les expositions nationales ou universelles, véritables vitrines du progrès, permettent alors de présenter innovations techniques et produits. Les distinctions obtenues par J. L. Martin aux expositions de Paris, du Havre et de Santiago figurent sur la boîte comme autant d’atouts commerciaux.
Bergier, Jean-François, Histoire économique de la Suisse, Lausanne : Payot, 1984.
Sauerländer, Dominik, Dubler, Anne-Marie, « Fromage », in : Dictionnaire historique de la Suisse (DHS).
Stalder, Hans, « Industrie laitière », in : Dictionnaire historique de la Suisse (DHS).
Hainard, François, Sociologie de la paysannerie. Approche pluraliste de la collectivité paysanne du Val-de-Travers, Berne : Peter Lang, 1981.