Natif de Berthoud, Samuel Hieronymus Grimm, avant de partir à Paris puis de se fixer en Angleterre où l’accueille son ami Johann Wäber – John Webber (1751-1793), peintre et dessinateur du troisième voyage de Cook –, s’est rendu à Môtiers. Il y a réalisé au moins trois documents (ainsi que la présente représentation) : un lavis de la Cascade (MRM 73.1.1), des dessins aboutissant à la IIe Vue de Motiers-Travers et de ses environs, gravée comme planche N°38 des Tableaux de la Suisse.
La maison de Jean Jaque a Mortier dans le Val de Travers (titre manuscrit).
Le bâtiment est figuré isolé, sans la maison contiguë qui date pourtant de 1759. A gauche, au fond, se distingue le Mont de Sassel (Chapeau de Napoléon) de forme correctement arrondie ; l’avant-plan est occupé par la fontaine portant la date conforme de 1727, avec deux planches de lessiveuses alentour.
La maison n’a qu’un étage sous un toit aplati d’environ 30°, couvert de bardeaux assurés par quelques pierres. La façade orientale, percée d’ouvertures sans régularité, présente au rez-de-chaussée une fenêtre double, une petite fenêtre à volet horizontal et un guichet pour éclairer le corridor.
A l’étage s’ouvrent une petite fenêtre tripartite à meneaux avec linteau en accolade, deux grandes fenêtres à croisée – celle de droite à demi masquée par un volet – avec linteau en accolade, et une petite fenêtre donnant sur un couloir.
Quant au pignon, une porte à deux battants offre l’accès aux combles éclairés par trois lucarnes disposées en triangle.
Le côté méridional comprend un espace clos sous la galerie – construite en 1691, date à laquelle le rural accolé à l’ouest est rebâti – terminée à l’est par un espace planchéié pourvu de deux ouvertures. Elle surplombe une courette accessible de l’est par une porte double. Au-devant se trouvent un vaste bûcher puis une grange comportant un escalier intérieur. A la fin des années 1780, cette dernière sera étendue de 3,50 m vers le sud.
Rousseau est assis devant la porte d’entrée ouvrant sur la Grande-Rue, les pieds reposant sur une planche dégagée du sol, l’air de lire ou penché sur un travail, un enfant appuyé à sa jambe droite.
A chaque angle du bâtiment, à mi-hauteur, se découvrent des structures vides identifiées comme des niches ayant pu abriter des statues, ce qui a permis de postuler une date d’existence du bâtiment antérieure à la Réforme de 1536. Les analyses dendrochronologiques l’ont fait remonter à la fin du XVe siècle, soit avant 1494, date donnée par le dernier cerne conservé.
Même si la géométrie est un peu incorrecte et l’élévation n’a pas la précision d’un dessin d’architecte, c’est l’unique vue authentique des façades sud et est de la demeure occupée par Rousseau durant son exil de 1762 à 1765. L‘œuvre à la plume rehaussée de lavis est riche de détails qui ne peuvent avoir été relevés que sur place. Elle rend caduque la gravure officielle qui continue à perturber les représentations de la maison.
[Commentaire: Cette notice est à comparer avec celle intitulée « Une vue officielle mais très contestable de la maison de Rousseau à Môtiers », référence MRM 11.1.1]
BOSCHUNG Bernard et BUJARD Jacques. 2012. La maison Rousseau et le Petit-Clos à Môtiers restitués par l’archéologie du bâti. Revue historique neuchâteloise, n° 3-4 : 161-192.
CLAY Rotha Mary. 1941. S.H. Grimm of Burgdorf. Londres: Faber.
DUFOUR Théophile et PLAN Pierre-Paul . 1924-1934. Correspondance générale de J.-J. Rousseau. Paris : A. Colin : t. 14, 140/141.
KAEHR Roland. 2011. Un document iconographique exceptionnel : le lavis original de Le Barbier. Bulletin de l’AJJR (Neuchâtel) N°71 : 30-32 (1 ill.).