L’horlogerie s’implante dans le jura neuchâtelois dès la fin du 18e siècle. La fabrication des montres est rapidement soumise au principe de la division du travail. Le modèle de la manufacture dispersée prend dans la région le nom d’établissage. Un grand nombre d’artisans, économiquement indépendants et géographiquement dispersés, fabriquent les différentes pièces entrant dans la réalisation d’une montre. Ils vendent ensuite leur production à un établisseur qui assemble les pièces. L’établisseur se charge parfois de la commercialisation du produit fini ou le transmet à un voyageur de commerce qui en assure la vente. La circulation des pièces entre les différents ateliers est confiée au commis.
Le commis, portant sa sacoche en bandoulière et son chapeau à la main, est entré par la porte située à gauche pour recevoir une boîte de pièces d’horlogerie que lui tend le chef d’atelier. Ce dernier porte encore sa loupe de précision sur le front. Le petit local dans lequel ils se trouvent est largement éclairé par trois baies vitrées, donnant aux ouvriers des conditions de travail optimales pour la qualité de leur production. Assis devant leur établi, deux ouvriers travaillent minutieusement, leurs outils disposés devant eux.
Dans le système de l’établissage, en raison de la dispersion géographique des différents artisans, le commis acquiert un rôle important. Il crée le lien indispensable entre les différents ateliers et permet l’enchaînement des phases de la production. Bien que l’établissage perdure jusqu’au 20e siècle, la création des grandes manufactures horlogères à la fin du 19e siècle en diminue l’importance. La scène que peint en 1941 Lucien Grounauer représente probablement une réalité plus ancienne.
Blanchard, Philippe, « Une production éclatée », in : Le pays de Neuchâtel et son patrimoine horloger, Chézard-Saint-Martin : Ed. de la Chatière, 2008, pp. 15-22, 28-31.
Blanchard, Philippe, L’établissage. Etude historique d’un système de production horloger en Suisse (1750-1950), Chézard-Saint-Martin : Ed. de la Chatière, 2011.