Après avoir fait l’objet d’une présentation élogieuse dans la Description des Montagnes et des Vallées (…) de Neuchâtel et Valangin de F.-S. Ostervald, publiée dès 1764, la région de La Chaux-de-Fonds attire les voyageurs. Des gravures représentant des lieux pittoresques sont diffusées à partir de la fin du 18e siècle ; elles contribuent elles aussi à la notoriété des Montagnes neuchâteloises. Cette aquarelle est l’une des toutes premières représentations en couleur de l’agglomération chaux-de-fonnière.
Le village de La Chaux-de-Fonds est représenté avant le grand incendie de 1794, vu du sud. Une scène de fenaison et quelques têtes de menu bétail meublent le premier plan. A droite, des voyageurs suivent la vieille route de Neuchâtel (l’actuelle rue du Grenier). Du même côté, derrière la petite agglomération, une ligne de fermes espacées correspond à l’actuelle rue de la Charrière.
La plupart des maisons s’inspirent encore des fermes traditionnelles, mais quelques bâtisses présentant des logements sur trois niveaux préfigurent l’habitat locatif du 19e siècle. L’église primitive, agrandie à diverses reprises et détruite en 1794, se dresse à l’emplacement du Grand Temple actuel. On distingue le petit bâtiment des archives communales adossé au clocher. La maison dotée d’un petit fronton et d’un perron, vers la gauche, a été édifiée par le capitaine Louis Robert en 1774. Epargnée par l’incendie, elle porte maintenant le n° 10 de l’avenue Léopold-Robert.
La composante bucolique et la couleur atténuent l’austérité du paysage. En privilégiant le pittoresque, l’artiste a vraisemblablement répondu aux attentes d’un public sensible à la montée du romantisme.
Bien qu’il ne soit pas d’une parfaite exactitude, ce document nous renvoie l’image d’une agglomération marquée à la fois par l’agriculture (le bétail et la scène de fenaison du premier plan) et la croissance démographique (les grands bâtiments) engendrée par l’essor de l’horlogerie. Néanmoins, cette activité industrielle échappe au regard du peintre car la plupart des artisans travaillent à domicile.
Courvoisier, Jean, Les monuments d’art et d’histoire du canton de Neuchâtel, tome III, Bâle: Ed. Birkhäuser, 1968, pp. 328-353.