Maurice Bavaud nait à Neuchâtel en 1916, dans une famille catholique de six enfants. Il effectue sa scolarité auprès des Frères des Ecoles chrétiennes à Neuchâtel, puis entame un apprentissage de dessinateur technique. Il embrasse ensuite la vocation sacerdotale en rejoignant le séminaire de Saint-Ilan en Bretagne. En octobre 1938, il part sans prévenir personne pour l’Allemagne où il tente à plusieurs reprises d’approcher Hitler dans le but de l’assassiner. Arrêté par hasard à la mi-novembre parce qu’il voyage sans titre de transport, on découvre sur lui une arme qui trahit ses intentions. Il est alors emprisonné et condamné à mort. Le 14 mai 1941, il meurt guillotiné à la prison de Plötzensee à Berlin. Sa dernière lettre, écrite quelques heures avant sa mort, constitue l’un des rares documents nous éclairant directement sur les raisons de son geste.
La dernière lettre de Maurice Bavaud, datée du 12 mai 1941, est rédigée à la plume sur les feuilles lignées officielles fournies par la prison. Elles comprennent, déjà pré imprimé en lettres gothiques, les rubriques que le prisonnier doit remplir. L’expéditeur figure en haut à gauche. Maurice Bavaud adresse sa lettre à ses parents et leur annonce sa mort prochaine par décapitation. La première partie de la missive se présente comme une sorte de testament spirituel : réaffirmant sa foi dans l’Eglise catholique, il pardonne à ses ennemis. La seconde partie s’adresse plus personnellement à ses proches.
Cette lettre, écrite le 12 mai, ne parvient à la famille Bavaud à Neuchâtel que le 7 juin 1941, qui apprend ainsi la mort de Maurice près d’un mois après l’exécution. Les autorités helvétiques n’ont en effet pas averti la famille de cette issue fatale. Ce fait est révélateur de la position de la légation suisse à Berlin et des autorités suisses de l’époque. Suivant la position de Berlin, qui veut garder le secret pour ne pas que Bavaud puisse servir d’exemple à d’autres, la Suisse ne s’engage qu’avec beaucoup de retenue en faveur de l’accusé et n’ébruite pas l’affaire. Aussi l’action de Maurice Bavaud reste-t-elle largement inconnue jusqu’en 1976, date à laquelle le dramaturge Rolf Hochhuth remet son geste en lumière, le comparant à un nouveau Guillaume Tell.
Les motivations exactes du geste de Bavaud restent encore en partie mystérieuses et débattues. Si l’historien Klaus Urner conteste le caractère héroïque de l’action de Bavaud, Niklaus Meienberg, au contraire, lui rend hommage dans un film et un livre. Le Conseil fédéral a reconnu, en 1989 et en 1998, que les autorités suisses ne s’étaient à l’époque pas suffisamment engagées en faveur de Maurice Bavaud. A Neuchâtel, une plaque commémorative est apposée en 1998 sur sa maison natale, à la rue du Trésor 5. Une sculpture dédiée à Maurice Bavaud, oeuvre de l’artiste Charlotte Lauer, est inaugurée à Hauterive le 13 mai 2011.
Hochhuth, Rolf, Tell 38, Reinbeck bei Hamburg : Rowohlt, 1979.
Maurice Bavaud, Un Suisse de 22 ans tente d‘arrêter Hitler en 1938, Documentation pour le 60e anniversaire de sa mort, Berne : Comité Maurice Bavaud, 2001.
Meienberg, Nicolas, Maurice Bavaud a voulu tuer Hitler, Genève : Editions Zoé, 1982 (all. 1980).
Urner, Klaus, Der Schweizer Hitler-Attentäter, Stuttgart : Huber, 1980.