Au lendemain de la prise de pouvoir républicaine du 1er mars 1848, le gouvernement provisoire présidé par Alexis-Marie Piaget se met à la rédaction d’une constitution pour le nouveau régime. Dans ce cadre-là, une commission de sept membres est chargée de choisir les couleurs du manteau de l’huissier qui représentera Neuchâtel à la Diète fédérale. C’est l’occasion aussi de se pencher sur le futur drapeau cantonal. Le 11 avril déjà, la commission adopte les couleurs vert, blanc et rouge disposées verticalement, une croix blanche flottant dans le champ rouge. A La Chaux-de-Fonds, un drapeau est déployé sur l’Hôtel-de-Ville pour marquer son adhésion à la République. Le 30 janvier 1849, un décret du Grand Conseil interdit « le port des anciennes couleurs neuchâteloises ou prussiennes, des signes ou emblèmes destinés à rappeler l’ancienne domination, de tous les drapeaux de même nature ».
Formé de trois bandes de tissu coloré cousues, le drapeau présente les nouvelles armoiries cantonales : tiercé en pal, de sinople, d’argent et de gueules, ce dernier chargé en chef d’une croix alésée d’argent. Au centre du drapeau figure la date « 1848 » imprimée à l’encre noire. Un fourreau permet de fixer le drapeau à une hampe. Il s’agit probablement d’un des premiers drapeaux aux nouvelles couleurs cantonales.
Le choix du vert, du blanc et du rouge se réfèrent aux couleurs fédérales unies à la couleur verte. La commission justifie sa décision en désignant ces trois couleurs comme « un symbole des trois parties du pays, le vert pour la montagne, le rouge pour le vignoble et le blanc pour la partie agricole. » Au-delà de cette explication officielle, il faut probablement envisager l’influence des drapeaux tricolores français et italien sur le choix de la commission. Mais l’adoption d’un nouveau drapeau vise d’abord à marquer une rupture avec le passé, l’ancien écusson portant les chevrons de Neuchâtel étant associé à l’ancien régime et au roi. Révoquant cet argument, plusieurs voix demanderont par la suite sans succès le rétablissement des chevrons sur le drapeau cantonal : une initiative populaire est lancée dans ce but en 1934 par la société d’étudiants Zofingue ; une motion est déposée en ce sens au Grand Conseil le 20 mai 1946 ; une nouvelle initiative est refusée par le peuple en 1954.
La mémoire de la révolution neuchâteloise de 1848, Hauterive, Ed. G. Attinger, 1997, pp. 184-189.