Au XVIIIe siècle, le vallon de l’Ecluse à Neuchâtel n’est encore quasiment pas habité. La rivière du Seyon y coule avant de bifurquer à l’Ecluse en direction du lac. La présence du cours d’eau a attiré à cet endroit des moulins et d’autres petites industries qui profitent de la force hydraulique pour faire tourner leurs roues. Au milieu du XVIIIe siècle, une teinturerie s’installe ainsi au Prébarreau. Mais le vallon de l’Ecluse constitue aussi une promenade appréciée. A cet endroit, le Seyon n’est en effet pas encore pollué par les déjections de la ville. Une digue est construite sur la rive gauche du Seyon, protégeant le chemin des crues, et des peupliers plantés le long de la rivière ombragent les rives.
Placé sur la rive gauche du Seyon, l’artiste représente la colline du Château et la falaise de Prébarreau. La composition est dominée par la silhouette massive de la tour d’angle du Donjon, avant son abaissement en 1811 (pour éviter son effondrement). A sa gauche, les bâtiments du Château laissent deviner le sommet de la tour de la Collégiale. Au premier plan, un dessinateur est assis sur le bord de la digue, devant le flot abondant du Seyon. Sur la gauche, une passerelle en bois permet de gagner l’autre rive et de poursuivre son chemin en direction de la ville.
Sous l’impulsion des écrits de Gessner et de Rousseau notamment, la fin du XVIIIe siècle voit les mentalités s’ouvrir au préromantisme. Une nouvelle relation à la nature s’instaure. Libérée des a priori formels, la nature révèle sa diversité. Le vallon de l’Ecluse offre un environnement comportant tous les éléments du pittoresque chers aux romantiques : un coin de nature sauvage, traversé par un torrent impétueux et bordé par une falaise escarpé. La tour moyenâgeuse dominant la scène renforce encore cet effet.
Le conseiller d’Etat Louis de Marval est visiblement réceptif à cette nouvelle sensibilité. Dessinateur à ses heures, il recueille sa production dans un album. Une trentaine de vues de Neuchâtel et de la région y figurent.
Courvoisier, Jean, Neuchâtel, aquarelle du XIXe siècle, Neuchâtel : Ides et Calendes, 1976, pp. 28-29.
Jelmini, Jean-Pierre, Neuchâtel 1011-2011, mille ans – mille questions – mille et une réponses, Hauterive : Ed. Attinger SA, 2010, pp. 171-172.
Bregnard, Damien, « Marval, Louis de », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS).